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FAQ's

La colonisation n’avait-elle d’autre but que l’enrichissement des colonisateurs ?

Passons rapidement sur les colonisations antiques : la phénicienne et la grecque avaient essentiellement des buts commerciaux, la romaine, une vocation impériale.

 Les premiers colonisateurs occidentaux, Portugais et Espagnols, partirent à la découverte de la Route des Indes, les premiers par l’Ouest, les seconds par l’Est, afin de pouvoir commercer avec l’Orient, surtout l’Inde, la Chine et le Japon, supposés plus riches qu’eux, sans devoir passer par l’intermédiaire des Arabes. En cours de route, ils établirent des escales – devenues plus tard comptoirs commerciaux et colonies – avant de découvrir l’Amérique et de faire le tour du Monde. Suivirent les missionnaires, qui ne désiraient pas non plus piller les richesses des autres.

La seconde vague des colonisations, celle des Anglais, des Hollandais et des Français fut constituée d’émigrants qui fuyaient leur pays d’origine pour des raisons religieuses. Les puritains britanniques s’établirent ainsi en Amérique du Nord, les protestants hollandais et français en Afrique du Sud, dans les Antilles et au Canada.

 Tels furent les premiers colonisateurs.

 Ils entraînèrent, il est vrai, dans leur sillage d’abord les conquistadores, les pirates et les corsaires – ce fut l’époque des aventuriers, avides d’or et de richesses, non pas pour leurs nations, mais pour eux-mêmes – et ensuite des commerçants, entrepreneurs et hommes d’affaires aux pratiques plus légitimes, qui instaurèrent le troisième âge de la colonisation, celui du mercantilisme : la colonisation permettait, croyait-on, aux métropoles de s’enrichir par les échanges avec des partenaires obligés ou préférentiels : les colonies. Il n’était pas question de piller quiconque : on vantait au contraire la sagesse des « bons » sauvages » et des « Persans ».

 Les sciences et la littérature furent, encore plus que les marchands, bénéficiaires des voyages et des échanges des XVIIe et XVIIIe siècles : Darwin découvre à bord du Beagle l’évolution des espèces, on mesure la longueur du degré terrestre et ainsi les dimensions de la Terre, l’astronomie et la géophysique s’enrichissent des découvertes suscitées par le problème des longitudes, partout se constituent des collections botaniques, zoologiques et minéralogiques à partir d’échantillons recueillis dans le monde entier; philosophes et écrivains dissertent à propos des meilleures lois pour gouverner les hommes, que l’on considère comme étant partout également épris de religions, de philosophies, de droits et de morales diverses mais, au fond, équivalentes.

 Vint ensuite l’époque de l’impérialisme : la possession de territoires en Outre-Mer permettait aux Etats de manifester leur puissance et leurs ambitions hégémoniques : il s’agissait maintenant de dominer le Monde, ou de se le partager. Les hasards de l’histoire – ou les convergences dans le mouvement des idées – firent que le grand capitalisme se développa en même temps que l’impérialisme. A l’origine indépendants l’un de l’autre (le capitalisme fut d’abord industriel et financier), les deux mouvements convergèrent au XIXe siècle. Les colonies devinrent les sources de matières premières dont l’industrie capitaliste se révéla de plus en plus avide. Mais la motivation politique demeura prédominante : le capitalisme devait, sous peine d’être renié par les humanitaires et les religieux, et de voir ses ressources et ses moyens humains d’outre-mer se tarir, financer le colonialisme et le développement des pays colonisés. Il se maintint donc dans le sillage d’un impérialisme qui se voulait civilisateur. Ce fut l’époque des grandes réalisations coloniales : ports, chemins de fer, équipements sanitaires et éducatifs.

Ainsi, à toutes les périodes de sa courte histoire – de 1492 à 1960, le tiers de la durée de l’empire romain – prédominèrent tantôt l’une, tantôt l’autre, des nombreuses motivations de la colonisation : politiques, économiques, religieuses, scientifiques et culturelles. Toutes demeurèrent sous-tendues par l’esprit de découverte, d’aventure, et par les idéalismes – ou les illusions – des civilisateurs religieux et laïcs et les ambitions des nations européennes.