FAQ's
Peut-on parler de paternalisme ?
Le système belge avait cependant ses particularités, qui l’ont fait qualifier de « paternaliste ». La Belgique ayant hérité du Congo presque contre son gré, d’un Roi accusé d’exploiter ses sujets africains de façon outrancière, voulait à tout prix mettre fin à ce mauvais procès et échapper aux reproches adressés à la gestion antérieure. Elle n’avait au surplus aucune vocation impériale, préférait commercer que dominer et, plutôt que des soumissions, s’attirer de sympathies propres à favoriser ses affaires et sa bonne réputation internationale. Dominée par une bourgeoisie catholique, pour elle les vertus cardinales résidaient dans l’honnêteté, la famille, la bonne éducation des enfants et la saine conduite des entreprises. En reprenant la succession de son Roi, elle s’estima donc investie d’une sorte de tutelle : elle devait éduquer ses « pupilles » en donnant des chances égales à tous – gérer leur patrimoine pour leur compte en attendant qu’ils soient à même de l’assurer eux-mêmes – garantir la primauté de leurs intérêts à l’intérieur de leur pays, et pouvoir recueillir à l’extérieur, sans remords, les fruits de cette bonne gestion.
Le système d’enseignement devait donc en priorité assurer l’accès de tous à l’enseignement fondamental, avant d’ouvrir graduellement aux plus méritants de ce premier cycle les établissements des degrés moyen et, enfin, supérieur. L’application de ce principe égalitaire et démocratique connut toutefois d’innombrables dérogations, imposées par la « mission civilisatrice »: il fallut bien, dès le début de la colonisation, former des prêtres, des maîtres d’école, des cadres médicaux, techniques et administratifs. Le Congo, à côté d’un enseignement primaire généralisé – le plus important d’Afrique – fut donc rapidement doté d’innombrables séminaires, écoles normales et professionnelles, écoles supérieures médicales et d’administration. De la fusion des plus avancées sortirent les trois Universités. Ce processus empirique ne fut donc pas guidé par le préjugé élitiste d’autres systèmes de colonisation, pour lesquels il fallait privilégier la formation d’une élite politique et culturelle acquise au colonisateur, au détriment de l’enseignement de masse.
La gestion du patrimoine des colonisés, considérés comme des dépendants sous tutelle, impliquait que le produit de la gestion de leur fortune – les richesses de leur sol – leur revienne intégralement. Les entreprises étaient donc tenues de « rapatrier » la valeur à l’embarquement des exportations. Elles ne pouvaient tirer bénéfice que de la valeur ajoutée apportée par les opérations extérieures générées par les produits congolais : commercialisation internationale, transports maritimes et aériens, transformation de matières premières en produits finis. Encore que, concernant ce dernier point, les entreprises étaient fermement invitées à assurer le maximum de transformations sur place. Un autre corollaire de la gestion patrimoniale était la séparation des budgets : aucune taxe, aucune recette.